Le sud de Madagascar en état de sécheresse est menacé par la famine
"Depuis le mois d’octobre, nous n’avons pas eu de pluie"
Sœur Damien Koenig, Responsable du programme humanitaire à Iléna situé dans le Sud-Est du pays, s’est confiée à nos équipes sur les difficultés croissantes auxquelles elle doit faire face : « Depuis le mois d’octobre, nous n’avons pas eu de pluie alors que nous devrions être en pleine saison des cyclones. De plus, rien ne s’annonce au niveau des précipitations. Nous avons uniquement eu de la grêle qui a abîmé les plantes.»
Le manque d'eau potable va entrainer une crise alimentaire majeure
" En 60 ans, nous n’avons jamais vu les sources d’eau tarir. Nous sommes dans l'obligation de rationner notre consommation d'eau."
En janvier 2017, 1,1 millions de personnes manquaient d’eau potable à Madagascar (Sources OCHA) et près de 850 000 personnes étaient en situation d’insécurité alimentaire sévère dans la Sud du pays (Sources PAM). Des chiffres importants qui traduisent la difficulté du pays à faire face au phénomène climatique. Sœur Damien Koenig aide les populations locales depuis plus de 50 ans à Madagascar. Elle nous explique comment gérer la problématique de l’eau au quotidien : « En 60 ans, nous n’avons jamais vu les sources d’eau tarir. Nous sommes dans l’obligation de rationner notre consommation d’eau. Nous ouvrons l’eau une heure dans la matinée et une heure dans la soirée de 17h à 18h. C’est pour nous le seul moyen d’avoir un peu d’eau pour les 70 familles qui vivent dans le village. Nos sources sont presque à sec et celle qui devrait fournir le village en eau ne fait plus que goutter. »
La sécheresse a des conséquences sur l'agriculture et la sécurité alimentaire du pays
Selon l’Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture, Madagascar fait partie des 37 pays qui dépendent d'une aide extérieure pour se nourrir. Selon Sœur Damien Koenig, « le manque d’eau a une influence très importante sur notre production de nourriture. Les rizières sont à sec, les plantes saisonnières (maïs, manioc, patates douces, haricots…), qui devraient maintenant remplacer le riz, n’ont même pas pu être plantées, le sol étant trop dur ! ».
La luttre contre la malnutrition est quotidienne
" Nous menons maintenant une lutte continuelle contre la malnutrition ! "
Pour les populations locales, les conséquences de cette faible production agricole sont inquiétantes : « Le prix du riz a beaucoup augmenté, ainsi que les produits de première nécessité tels que le sucre, l’huile… Depuis Noël, nous avons encore subi une augmentation importante qui nous inquiète de plus en plus pour l’avenir. Nous avons encore quelques stocks de nourriture, notamment une réserve de 10 tonnes de riz. Cependant, il nous faut 2,5 tonnes de riz par mois pour nourrir la cantine, la vingtaine de personnes malades et offrir un supplément aux 70 familles du village qui sont sans revenus. Le spectre de la famine fait peur à tout le monde, nous menons maintenant une lutte continuelle contre la malnutrition ! »
Un impact sur l’approvisionnement de la région en électricité
Sœur Damien Koenig ajoute que « la sécheresse a des conséquences sur notre approvisionnement en électricité. En effet, depuis plusieurs mois nous constatons de nombreuses coupures de courant. Celles-ci sont principalement dues au fait que des barrages et turbines fournissent l’électricité de la ville et, sans eau, celles-ci ne fonctionnent pas. Heureusement, nous avons quelques installations solaires au sein de notre village. Pour vous dire la gravité de la situation, même l’hôpital envoie, à plus de 7km, du personnel chercher de l’eau dans les rivières.»
Le Sommet de la Francophonie : des retombées néfastes pour les malgaches
Enfin, la Responsable du programme humanitaire fait un constat amer du Sommet de la Francophonie, qui a eu lieu en novembre dernier : « Contrairement à ce qui a été dit, le Sommet de la Francophonie n’a rien arrangé pour nous, au contraire. Nous n’avons jamais eu d’aides de la part du gouvernement et le Sommet a eu pour effet d’augmenter les prix des voyages et les tarifs du secteur touristique. À Madagascar, les locaux parlaient du Sommet de la « Francofolie » pour livrer leur sentiment sur cet évènement. »